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Photo du rédacteurArsène Lames

Le cannabis et la santé cardiovasculaire : quels sont les risques ?



Le cannabis, également appelé marijuana, est la substance psychoactive la plus consommée dans le monde après l’alcool et le tabac (Nations Unies, 2020). Alors que son usage récréatif et médical se répand, des préoccupations émergent quant à ses effets potentiels sur la santé cardiovasculaire. Examinons les dernières données scientifiques sur les liens entre cannabis et maladies cardiaques.


Effets cardiovasculaires aigus du cannabis


Lorsqu’il est fumé ou ingéré, le cannabis exerce rapidement divers effets sur le système cardiovasculaire (Franz et Frishman, 2016) :

  • Augmentation de la fréquence cardiaque de 20 à 100% suite à l’ingestion (Sidney, 2002).

  • Élévation de la pression artérielle quelques minutes après l’inhalation (Benowitz et Jones, 1975).

  • Dilatation des vaisseaux sanguins, entraînant une baisse de la pression artérielle en position couchée (Benowitz et al., 1979).

Ces effets sont généralement bien tolérés chez les jeunes en bonne santé, mais peuvent présenter des risques chez les personnes âgées ou avec des problèmes cardiovasculaires sous-jacents (Franz et Frishman, 2016). Des cas d’infarctus, d’arythmies ventriculaires, d’angor et d’accidents vasculaires cérébraux ont été rapportés peu après la consommation de cannabis (Singh et al., 2021).


Consommation chronique de cannabis et maladies cardiovasculaires


Outre ses effets aigus, une consommation régulière et prolongée de cannabis pourrait également accroître les risques de maladies cardiovasculaires, selon plusieurs études récentes :

  • Une méta-analyse de 35 études observationnelles publiée en 2017 a révélé que les consommateurs chroniques de cannabis avaient 56% plus de chances de développer une maladie cardiovasculaire prématurée (A. Singh et al., 2017).

  • Une étude cas-témoins publiée en 2022 a montré que les gros consommateurs réguliers (plus de 20 joint-années) avaient significativement plus de risques d’infarctus, d’accidents vasculaires cérébraux et d’insuffisance cardiaque (Reis et al., 2022).

  • Une étude de cohorte sur plus de 33 000 patients a montré une association entre l’usage quotidien de cannabis et l’hypertension artérielle pulmonaire (Parikh et al., 2022).


Mécanismes proposés des effets cardiotoxiques


Bien que des recherches supplémentaires soient nécessaires, plusieurs mécanismes physiopathologiques pourraient expliquer les effets délétères du cannabis (Jouanjus et al., 2017) :

  • Le tétrahydrocannabinol (THC) induit un stress oxydatif et une inflammation vasculaire pouvant mener à l’athérosclérose (Singh et al., 2021).

  • L’exposition chronique au cannabis entraîne des changements dans l’activité sympathique et le tonus vasculaire (Pacher et al., 2017).

  • Le THC peut favoriser la formation de caillots sanguins et modifier la fonction plaquettaire (Napper et al., 2022).

  • L’inhalation de la fumée de cannabis irrite et endommage les vaisseaux sanguins des poumons (Ghofrani et al., 2022).


Incertitudes et controverses


Malgré ces résultats préoccupants, d’importantes incertitudes demeurent concernant le cannabis et la santé cardiovasculaire (Navaneethan et al., 2022) :

  • Les études observationnelles ne permettent pas d’établir un lien de causalité direct entre le cannabis et les maladies cardiaques.

  • Les effets cardiotoxiques pourraient être liés aux modes de consommation (fumée, vapotage, ingestion) plutôt qu'au cannabis lui-même.

  • Le risque relatif est difficile à quantifier précisément et varierait selon la fréquence d'utilisation.

  • L'interaction avec d'autres facteurs de risque cardiovasculaire (tabac, alcool, sédentarité) n'est pas bien comprise.

  • Les effets du cannabis médical chez les patients cardiaques ne sont pas bien établis.

  • Peu d'études se sont intéressées aux nouvelles formes de cannabis à haute teneur en THC.

Malgré ces zones d'ombre, un principe de précaution s'impose chez les patients cardiaques et ceux présentant des facteurs de risque cardiovasculaires importants. Les professionnels de santé doivent questionner leurs patients sur leur usage de cannabis et les sensibiliser aux risques. Des politiques de santé publique visant à limiter l'usage récréatif et à promouvoir des modes de consommation plus sûrs devraient être envisagées.


En conclusion, des signaux préoccupants indiquent que le cannabis, en particulier lorsqu'il est consommé de manière chronique et à haute dose, pourrait avoir des effets néfastes sur la santé cardiovasculaire. Toutefois, la relation de causalité n'est pas définitivement établie et fait l'objet de débats dans la communauté scientifique. D'autres travaux sont nécessaires pour mieux comprendre les mécanismes en jeu et guider l'usage médical du cannabis chez les patients cardiaques. Une approche fondée sur le principe de précaution reste de mise en attendant un consensus scientifique plus clair.

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